Une ''single cône'' spéciale confinement

Bonjour à tous,

Pendant le confinement j'ai décidé d'utiliser un manche de guitare ''Ovation'' apporté par un ami pour construire une guitare à résonateur '' single cône'' et ''biscuit'' (je n'en avais pas) . J'ai utilisé les plans de Stewmac, que j'ai un peu aménagés à ma sauce. Pas de pbs particuliers à la construction sauf le manque non prévu de colle à placage et l'obligation d'utiliser  les restes  disponibles. Ainsi le fond est en Cp ordinaire, la table en Cp bouleau aviation (qui donne de bons résultats dans les guitares de jazz électrique) et les éclisses en châtaignier. tous les éléments de structure, blocs,  barres, puits, sont en érable  ( j'en ai plusieurs plateaux) . Comme sur les Ovations , le manche est boulonné sur un bloc. J'ai fabriqué un cordier et un repose main en alu et le ''coverplate'' est un couvercle de poêle en inox.
J'ai ensuite acheté un cône National des cordes 13/56 d'Addario et voilà....

Que dire de cet instrument ? ... en slide le son est là, bien puissant et équilibré .. MAIS  ... je ne suis pas encore satisfait du jeu au doigts . La guitare semble ne pas respirer librement , le sustain est bien présent mais les notes sont comme bloquées . Je n'y retrouve pas le son que je peux entendre sur les vidéos.

Je cherche une solution, est que :

- le cône manque de jeu dans son logement ?
- le puits est trop ''calé'' dans la structure très rigide en érable ? ( avec les ''poteaux'' qui relient le puits au barrage du fond).
- le fond (avec barrage puissant) est trop rigide ?
- la table trop raide ?
Je précise que l'angulation  cordier /chevalet n'excède pas 5° et que je peux la diminuer ...

J'aimerais bien améliorer ce point d'autant qu'il n'est pas exclu que j'en construise une autre l'hiver prochain. De plus je vais essayer de fabriquer un ''biscuit'' en alu  semblable  ceux qui figurent au catalogue de National resophonic, je peux friser l'élu, il suffit que je prenne le temps de dessiner la pièce ...

Voilà l'affaire, je lis depuis pas mal de temps les échanges sur ce forum et  c'est à mon tour de solliciter l'aide des spécialistes pour résoudre ce problème.

Merci de m'accueillir et pour vos avis judicieux,
barbenoire

Bien jolie réalisation hélas je ne te serais d'aucune utilité pour la lutherie juste une remarque la plupart des résonateurs bois ne sont pas construits en bois massif comme sur la plupart des bonnes acoustiques. après pour le son qui bloque Est ce que ca pourrait venir du sillet ?

Barbenoire a écrit:

je peux friser l'élu

ou fraiser l'alu ?

Fraiser '' bien sûr, je me suis fabriqué une fraiseuse à commande numérique , ça me permet de réaliser des pièces , essentiellement en 2D-1/2, ...je ne fraise pas l'acier mon matos n'est pas assez puissant.

Bon, j'ai amélioré les choses, j'ai retravaillé le chevalet , abaissé les cordes, supprimé les potelets entre le puits et le fond, donné un peu de jeu au cône dans son puits et diminué l'angle entre cordes et cordier. Je suis presque à zéro. Dans l'ensemble ça va bien mieux, même si ce n'est pas aussi ''crémeux'' que je le souhaite. Après tout ce n'est que ma première. Je pense que ma structure en érable est vraiment rigide ( un peu trop) , je n'ai pas lésiné sur les sections et ça se ressent au niveau du poids de l'instrument.
Merci pour les conseils je poursuis ma mise au point .

barbenoire

Félicitations pour ta réalisation, et pour le recyclage vertueux!!!

Ah deux facteurs qui me sautent aux oreilles: si ton instrument et son cône sont neufs, il faut garder à l'esprit que le vrai potentiel ne va apparaître qu'au bout d'un long temps de "rodage"...
C'est la grosse erreur de pas mal de démos "avant / après", quand quelqu'un décrète qu'il faut changer le cône, et que le son est jugé aussitôt les cordes retendues...

Plusieurs mois...six mois c'est parfois le moment ou les basses apparaissent pleinement.

Mème dans le cas d'un simple démontage-remontage, d'où la bêtise des annonces de vente où l'instrument est démonté juste pour photographier l’intérieur.

Sur les résonateurs le temps de jeu est une sorte de capital, pendant lequel toutes les pièces vont lentement s'ajuster les unes aux autres jusqu'à un point idéal d'équilibre.

Prends donc beaucoup de recul et de patience.

Ta structure est assez différente de la structure des "National" qu'on a en point de référence; c'est normal que la sonorité ait une personnalité différente, et c'est tout l’intérêt d'ailleurs.

Le second point est dans la forme de ton sillet de chevalet, la plupart des luthiers non spécialisés passent à côté du fait que les résonateurs nécessitent un soin absolu dans la forme des entailles des cordes, les cordes ne doivent pas être enterrées dans le sillet, ni non plus simplement être posées dessus.

La matière utilisée pour le sillet et pour le biscuit sont aussi d'énormes facteurs dans le rendu sonore; et attention, si l'érable semble avoir la validation de la plupart des musiciens et luthiers, mais attention il y a différents érables..............

Hum, la valeur de l'expérience est unique, mais l'aluminium pour le chevalet est loin de laisser espérer quelque chose de musical, l'essai te permettra de te forger ton propre avis.
Ce gadget proposé par National RésoPhonic (qui s'appelle depuis peu "National Guitars") est simplement une visée vers une niche marketing.
Je suis à peu près certain que si Don Young était encore parmi nous, il jetterai par la fenêtre celui qui à proposé la mise en vente de ce produit dérivé très dérivé...
Cette marque évolue manifestement vers une gestion de type mercantile, et je suis à deux doigts de penser que la qualité va s'en ressentir.

J'ai entendu dire que les premiers cônes dits "Hot-rod" lancés comme une amélioration notoire en 2007 pesaient dans les 25 grammes...et force est de constater que les cônes disponibles à ce jour sont désormais à 27 grammes.
Ce qui est l'équivalent des cônes "made in China".... annoncés sous une marque qui joue sur un brouillage de pistes: "Continental" avec un pied en Europe et un autre en Chine... (ou plutôt juste un orteil en europe).

On se doute que ce rapport de poids traduit une épaisseur et donc un potentiel sonore différent...si jamais tu as l'occasion de démonter ton cône et de le peser ce serait bienvenu.

https://slide.forumactif.com/t8007-photos-d-observation-de-cones-tricone?highlight=le+poids+des+c%C3%B4nes

En recoupant divers fils, j'ai appris que le préposé aux cônes (formé par Don Young) est parti en retraite...qui fait désormais ce boulot? comment a t'il appris à le faire?...

Enfin c'est un autre sujet....
Bonnes expérimentations à toi, et merci de nous les faire partager

Merci pour les aimables appréciations. Je comprends parfaitement le besoin de ''vieillissement'' de l'instrument, en gros c'est la même chose avec les guitares acoustiques qui se bonifient si elles sont jouées intensément (pas par des brutes quand même !) .. je vais suivre cela de plus près.

D'accord également en ce qui concerne la structure . J'avoue avoir été un influencé par le tirant des cordes en installant une structure simple mais très rigide. je pense que les parois du puits sont trop épaisses ( 9,5 mm) en contrecollé d'érable doux. La barre et les blocs sont en érable dur , assez lourd mais très rigide. Le cône repose sur un rebord contrecollé d'érable que j'ai ajusté et lissé pour avoir une portée la plus nette possible. Un instant j'ai envisagé de le faire reposer sur cercle d'aluminium de 1,5mm. la liaison manche / caisse est bien contreventée pour ne pas trop solliciter la table en compression. Là aussi j'"ai été trop prudent car le Ctp aviation résiste très bien en compression et le collage du puits se fait par l'intermédiaire d'une surlargeur (anneau) en érable contrecollé . De fait il y' avait peu de chance que le puits s'ovalise sous la compression. je suis donc un peu surabondant.

La découverte de cet instrument m'enchante même si j'ai abandonné le picking depuis mes années de lycée (il y'a des lustres ) et que je vois bien bien que je ne suis pas prêt à retrouver la fluidité et l'indépendance de mes doigts. Peu importe, je m'amuse bien et c'est très addictif .

Je construirai au moins un autre instrument dès que j'aurais le temps. Cette fois avec moins d'improvisation et une limitation des sections aux efforts réels que je peux mesurer maintenant. Côté construction, j'aime bien faire les manches et en particulier à la taille de mes petits doigts boudinés, toutefois le tarif des pièces indispensables (frettes, mécaniques, bois de touche et éventuellement trussrod ) si on cherche la qualité, ne cesse de grimper et il est moins cher de recycler un manche de bonne qualité. Pour cette prochaine guitare je passerai au 12 frettes hors caisse, l'actuelle étant à 14 frettes hors caisse.

J'ai aussi imaginé de combiner métal et bois , table et puits en laiton ou acier et corps en bois. Les assemblages sont aujourd'hui faciles avec les colles dont on dispose . On peut aussi imaginer une liaison métal bois en carbone/epoxy . Par expérience ça tient le coup !.

A l'occasion je pèserai le cône, je l'ai acheté chez Thomann, pour avoir une livraison garantie en cette époque troublée. J'ai conscience qu'il y'a en a certainement de meilleurs . On verre cela plus tard.

La taille des encoches dans le chevalet est effectivement délicate et source de progrès. Je pourrai en fabriquer un en collant un morceau d'ébène sur l'érable, ça facilitera le travail sur l'ébène . Le platane (qui est de la famille de l'érable) se prête bien aux chevalets de violons. IL faudra que j'essaye.

En ce qui concerne le biscuit, je m'interroge pour savoir si il doit être en bois ''dur'' ou ''doux'' . La transmission des vibrations en dépend. Je me suis même demandé si un biscuit taillé dans de l'élu dur et allégé par des évidement en forme d'étoile, donc fin et résistant, pourrait donner des résultats .. Je tenterai celà.

Bien d'accord sur les évolutions mercantiles des luthiers industriels. Je possède une Gibson 335 qui a à présent près de 50 ans et qui sonne toujours parfaitement malgré les attaques du temps . Je doute qu'un modèle 2020 soit dans le même état en 2070.

Encore merci et je vous ferai part de mes expériences...

Merci à tous pour votre accueil
barbenoire

Alors tous mes encouragements pour le prochain projet, et le dérouillage de tes doigts (avec le plaisir et la découverte de ton instrument comme moteurs; ça va aller tout seul!).

Effectivement comme tu l'a déjà noté, il semble que tu as fait un instrument très solide, peut-ètre un peu trop?...vrai que les anciennes ont cet aspect très brut, mais quand on s'y penche on se rend compte qu'il y a plus de subtilité qu'on ne peut l'imaginer en les voyant.
C'est vrai qu'on est dans des côtes qui semblent énormes par rapport à de la lutherie, mais tout ça est parfaitement pensé; c'est juste que le point d'équilibre entre résistance et réactivité se trouve à un niveau très décalé.

Oh je pense que ton cône est une bonne base, à ce jour il n'y a pas d'alternative plus probante (hors luthiers spécialisés et donc haut de gamme), bien qu'on entende parler des cônes "Continental" en termes dithyrambiques parfois...le problème étant que sous cette appellation on peut trouver tout et n'importe quoi, leur provenance ne permettant pas de garantir que le produit attendu corresponde à ce qu'on attend...

Bonnes expérimentations à toi et merci pour le partage!

Bonsoir à tous,
J'ai tenté ma petite expérience et fabriqué un biscuit en alu avec sillet en érable +ébène.. (photo ci-dessous) .. je suis satisfait (à mes oreilles de profane) la projection est bonne et le son plus net . L'ensemble est aussi bien plus léger que le biscuit fourni avec le cône par National Reso, j'ai particulièrement soigné la portée du biscuit sur le cône par ponçage à l'eau et le sillet est enfoncé à force dans la fente du biscuit. Pas de colle. je vais en rester là pour l'instant et attendre que le tout se stabilise ..

Pour info j'en ai profité pour peser le cône et j'en  suis à 27g.. donc un peu plus lourd que les anciens si je comprends bien ...Dans ce cas quel serait le fournisseur le plus pointu et donc le plus léger ?

Je vais poursuivre la découverte de cet instrument très attachant et compiler les infos à reporter sur le prochain .

Affaire à suivre ..merci,

barbenoire

PS: Les trous de vis correspondent au premier ''cover plate'' , que j'avais réalisé en alu et qui s'est effondré sous la pression du cordier...

Merci beaucoup pour la pesée!!

Ca confirme ce que je redoutais....NRP oups pardon "National guitars" se laisse aller.....

Comme je te disais, ces cônes ont, ou avaient la meilleure réputation...bien sûr les luthiers spécialisés sont les seuls capables de pousser la finesse jusqu'à atteindre celle des anciens cônes "National", mais pour des raisons d'éthique assez évidentes; ce serait vraiment maladroit d'oser leur demander de vendre leurs cônes séparés de leurs instruments.

La maitrise de cet art représente des recherches très poussées, sur les matériaux, les outils, et surtout la mise au point du geste........c'est presque l'art de l'archer Japonais.
Il faut voir les vidéos généreusement diffusées sur le web par ces luthiers; c'est fascinant à voir.

Félicitations pour ta réalisation, quelle précision!

Avec le temps quand tu t'habitueras à ton instrument, prend le temps d'observer la différence avec le biscuit traditionnel, c'est toujours ça de gagné, pour mieux cerner ses goûts...ou juste par curiosité.