Absolument d'accord!
Il y a un truc un peu indécent quand on arrive à un certain prix.......et manifestement il y a un truc qui cloche dans nos systèmes commerciaux, attribution de valeur, intermédiaires...on est coincés dans une machine déglinguée et à moitié folle qui nous a attrapés par le doigt, mais on peut réfléchir à l'idée de ce qu'on peut faire de ce doigt pour appuyer ailleurs?
Vrai que quand j'y repense, au moment où j'ai découvert ce forum........je n'aurais jamais pensé pouvoir franchir le pas, je me disais que c'était absolument impossible face à mes réalités du moment.
J'avais mème du mal à comprendre comment on pouvait arriver à bloquer un mois, deux mois, ou trois mois de salaire..........
Et oser se trimbaler avec un truc aussi ostentatoire autour du cou; surtout pour jouer une musique véhiculant un tant soit peu de la mémoire de génies pauvres, spoliés de leur droits, et exploités depuis plusieurs générations.
(ça c'était il y a dix ans; mais c'est encore pire aujourd'hui, la moindre casserole ancienne s'affichant à plus de 3000!!!)
Qu'est-ce qui m'a décomplexé à ce point?
Aurais-je fait fortune?
Je me suis rendu compte que ces facteurs sont heureusement assez secondaires et opaques pour la majorité des gens qui vont recevoir d'abord la beauté, la sincérité de la musique, sans penser à jauger le pouvoir d' achat du musicien.
Le côté accumulatif de ma formule, avec autant d'instruments m'a forcé à me frotter a ce paradoxe: jouer dans la rues pour quelques pièces en déballant tout un magasin de musique sur le trottoir...........
Une seule fois j'ai reconnu deux regards, scruttant l'étiquette "national" (que quelqu'un a collé sur une copie avant de me la vendre, l'étiquette étant vernie, répugné par l'idée de véhiculer une marque, et donc une idée de valeur, j'ai essayé de décaper la tète en me rendant compte que je ne pourrais pas obtenir un aspect propre sans revernir avec peu de chances de retrouver la teinte exacte, j'ai donc simplement ajouté "Fake" à la place de "T
rade-mark" prenant parti du fait que le ridicule ne tuant pas...)
Deux bonnes tètes de guitaristes....avec une expression que je connais bien pour l'avoir aussi ressentie, entre frustration, envie, et rejet, ça m'a chiffonné, car voilà deux personnes qui avaient sans doute un peu de culture sur le sujet, avec qui j'aurais sans doute pu discuter de façon intéressante.
J'aurais pu leur dire "tout ce qui brille ne vaut pas de l'or"...mais j'ai aussi compris qu'il y a parfois des filtres qu'on installe autour de soi, sans en être conscient, dans notre façon d’être, de nous habiller, de nous déplacer, de parler...quand on est naturel...
Ce qu'on dégage résonne chez les autres, et fera amorcer un contact, ou au contraire écartera d'autres gens...(c'est valable dans les deux sens, autrefois j'étais en colère, et plus j'étais en colère, plus j'attirais toutes formes d'agression gratuite
rien de mystique, c'est simplement basé sur du concret).
Donc quelque-part, il se peut que je n'avais rien à partager avec ces gars trop soumis à un jugement basé sur des apparences?...un vrai passionné aurait pris le temps de discuter...
et de rire de la blague!
Une autre fois sur un festival de rue, un groupe traditionnel Roumain déboule (avec toute l'artillerie, Contrebasse, Cymbalum, et tout...), alors que j'avais bloqué une foule compacte sur le croisement de deux rues, fantastique!
J'étais astreint à des horaires de passage, et je n'étais pas censé m’arrêter à ce moment là, mais quand ils m'en ont fait la demande ça m'a semblé évident que c'était leur place plus que la mienne, depuis la nuit des temps; trop heureux de cette rencontre!
L'un d'eux regarde mon bazar et me dit avec peu de mots en anglais, que j'ai beaucoup, je dois être riche et que je dois rouler en Mercédes; ce à quoi j'ai simplement répondu: "non-non: Renault Clio!" éclat de rire et pur moment de musique!
On est un peu trop conditionnés dans notre soumission aux apparences, persuadés qu'il "vaut mieux faire envie que pitié"...avoir une grosse montre, une grosse voiture...mais quand on se regarde vraiment au fond des yeux tout ça ne compte plus.
Il y a d'autres moyens de se construire, de se gratifier, de prendre soin de soi, mais c'est moins "facile"...
Pour ce qui est des anciennes; je les ai trouvées au bon moment dans ma vie, en me disant que je n'aurais pas deux fois la chance de revoir passer ce moment...au tarif d'un instrument honnête pour un "pro"( mais encore loin de ce que coùterait un bel instrument de luthier, avec tout de mème le bonheur de pouvoir envisager une restauration)...avec quelques sacrifices, ou plutôt "choix de vie", un léger risque; mesuré au cordeau.
Etant en mauvais état cosmétique, et à restaurer, ce facteur les a fait sortir d'une catégorie alléchante pour les spéculateurs; double avantage: les zones abîmées me permettront de les identifier d'autant mieux en cas de vol (car on y pense aussi quand on est confronté à ces facteurs...
).
Hélas aujourd'hui ces instruments seraient revendus le double de ce que je les ai payés; j'arrive à les regarder sans penser à ça car je connais leur histoire, mais pour quelqu'un qui les découvre...il peut penser que j'ai un compte au Luxembourg......
Leur apparence cabossée atténue certainement cette notion, mai c'est surtout ma façon d’être, ce que j'exprime en concert, qui permet à chacun de réaliser clairement que je ne pratique pas l'évasion fiscale comme dada...
Pour ça et pour d'autres critères de conscience, je ne les expose pas souvent, uniquement quand je maîtrise les facteurs de circulation, d'installation, et d'hébergement, mais il y a des jours où je les joue pendant des heures, juste pour le bien qu'il me font à les écouter...ils m' apprennent vraiment à jouer mieux, et humblement.
Je ne peux mème pas imaginer m'en séparer, mème en cas de coup dur; je me débrouillerais toujours pour les sauver; j'espère que ma santé me laissera toujours cette possibilité.
En y réfléchissant, je regrette simplement de ne pas avoir réalisé plus tôt ce qu'ils pouvaient m'apporter, j'ai perdu beaucoup de temps, à une époque où j'étais beaucoup plus apte à apprendre...si je les avais découvert plus tôt je pense que ma musique se serait développée autrement....sans compter que mes copies tordues et plus lourdes auraient pu me causer de jolis problèmes physiques, après plusieurs tendinites...le "moins cher" aurait finalement pu coûter beaucoup plus cher...
Je prends le temps de développer cette notion, car beaucoup d'entre nous sont face à ces facteurs...on préfère hélas trop souvent en avoir plusieurs pour "pas cher"....c'est un truc qu'on nous a fait rentrer dans le crâne tout petits...quantité avant tout...promotion! soldes! réclame! avoir plus!........mais on retombe sur la comparaison avec la bouffe...ce n'est pas naturel, ça ne répond pas à un besoin réel, mais ça nous a été tellement martelé dans la tète que c'est devenu un réflexe.
Je ne culpabilise personne et je m'inclus aussi!
On a vraiment un appétit démesuré...mais c'est pareil à tous les niveaux de la société;...il faut avoir plus que le nécessaire vital, et on refuse de voir que c'est forcement au détriment de quelqu'un d'autre, de la planète, des générations futures...
C'est presque inscrit dans notre ADN, mais on peut se battre avec!
Enfin "contre" plutôt.
Moins mais de meilleure qualité...c'est un effort qui ne représente pas une "perte", mais un réel bénéfice au bout du compte.
Ca peut s'appliquer à plein de niveaux, et ça pourrait améliorer pas mal de vies...
En espérant ne pas jeter ma chance au visage de ceux qui en ont moins; car je me souviens du petit gars en colère que j'étais (je le suis toujours, et sans doute encore plus, mais de façon plus organisée), et j'ai juste envie de lui dire de ne pas s'en faire; la vie peut faire de sacrées surprises, faut lui faire confiance, ne pas trop se dire jamais...le chemin peut-ètre tordu mais ça vaut le coup.
Accrochez vous les loulous; le printemps arrive!